Comprendre la propagande

La propagande suscite l’adhésion à une cause par des techniques de communication. Elle a pour objectif de persuader puis de mobiliser. En général, elle vise à conformer les représentations, attitudes et conduites des cibles.

Afin de pouvoir l'identifier et la contrer au mieux, le candidat se doit d'en connaître les techniques.

Les oppositions qui régissent le conflit entre deux candidats dans une campagne politique peuvent être rapprochées de l’étude des conflits de Lord Ponsonby . En ne retenant que les séquences concordant avec l’affrontement politique, les propositions suivantes s’avèrent transférables à l’ambiance concurrentielle d’une compétition électorale.

  • Notre camp ne veut pas l’affrontement.
  • L’adversaire en est responsable.
  • Il est moralement condamnable.
  • Le monde de l’art et de la culture approuve notre combat.
  • L’ennemi utilise des techniques illicites, nous pas.
  • Ceux qui doutent de ces faits sont des traîtres ou des victimes des mensonges adverses ; l’ennemi, contrairement à nous qui informons, fait de la propagande.


Quatre leviers propagandistes s’avèrent employés (l’Institute for Propaganda Analysis) : le levier d’adhésion (virtue device), de rejet (poison device), d’autorité (testimonial device), et de conformité (together device). Le premier consiste à faire accepter une personne, une idée ou un parti comme « bon » en l’associant à des mots ou symboles «bons ». Le second en est l’opération inverse, avec des symboles du mal ou de valeurs réprouvées. Le levier d’autorité récupère le prestige d’un homme ou d’une institution ou exagère la valeur exemplaire d’un cas pour faire approuver ou rejeter. Le dernier, le levier de conformité, fait appel au poids de la masse des partisans ou à l’appartenance à une entité supérieure, Nation, Église pour obtenir l’adhésion.
La propagande suppose la réunion de plusieurs facteurs (Jean-Marie Domenach, « La propagande politique », Presses Universitaires de France, collection, 1950) :

  • la simplification et le choix d’un ennemi unique,
  • le grossissement et la défiguration des faits (ce qui ne signifie pas le mensonge systématique : moins la propagande risque d’être démentie, plus elle est efficace),
  • l’orchestration dans la répétition des thèmes principaux,
  • la «transfusion » qui est l’emploi des mythes préexistants et affects collectifs mobilisés au service de la cause,
  • le principe d’unanimité et de contagion : la pression conformiste du groupe sur l’individu.

L’objectif de la propagande est de transmettre des schèmes, c’est-à-dire des images mentales ou perceptuelles, plus ou moins bien organisées. Ces schèmes contribuent à façonner la conception de la réalité. Ils concernent les informations, les représentations, les valeurs, les décisions, les émotions.
Une propagande est d’autant plus efficace si l’information qu’elle véhicule répond aux besoins de l’homme. Le besoin d’être rassuré, le besoin d’identifier le mal et les adversaires, le besoin de simplification du réel.
Le message doit être court. Il est souvent résumable en un slogan.

Plusieurs procédés propagandistes classiques existent :

Les généralités attirantes

Cette technique consiste à utiliser des mots ou symboles associés à des concepts positifs. Ensemble, ils véhiculent des émotions de façon à entrainer l’approbation et la conviction du public. Les termes employés sont génériques (la liberté, l’amour, la patrie, l’honneur...) et interprétés de manière différente selon les personnes.

L’argument d’autorité

La réputation d’autorités scientifiques ou morales est maniée de façon à soutenir une idée, une position ou le cours des événements. L’argument est la légitimité, la compétence, l’expertise, la crédibilité. Des scientifiques, des organismes reconnus, des personnalités, viennent témoigner, approuver ou soutenir un élément. Parfois, l’autorité considérée n’a pas de rapport direct avec le thème abordé. Sa légitimité absolue est employée.

L’argument de masse

Cette procédure présente une idée comme populaire et défendue par une majorité. De cette façon, l’opérateur la justifie et réduit l’opposition. Il est en effet difficile de contredire ce que pense la majorité. Le nombre sert d’argument. Il est difficilement concevable que tous se trompent. Par ailleurs, être en désaccord avec cette masse implique d’aller à leur encontre et donc de s’isoler socialement.
La majorité considérée n’est pas absolue mais relative : il s’agit de celle à laquelle appartient l’audience. Il peut s’agir d’une ville, d’un quartier, d’une rue, d’une communauté, d’une classe sociale, par exemple.

L’argument de banalité

Une situation ou une idée est présentée comme courante et normale, relevant du bon sens de façon à la justifier. Elle est abordée comme acceptée de tous, banale. Elle est donc peu remise en question. Il est difficile d’argumenter contre le bon sens.

Le moindre mal

Cette technique expose un choix ou une situation en la présentant comme la moins préjudiciable, parmi toutes les alternatives. La solution désirée n’est pas explicitement proposée. Elle apparaît naturellement la plus pertinente au vue des autres possibilités. Elle est généralement proposée en dernier lieu de façon à paraître une échappatoire aux premières propositions beaucoup plus négatives.

Le changement de rythme

Ce procédé consiste à estimer la tendance d’une situation de façon à réagir a contrario pour essayer de minimiser son évolution. Cette manœuvre cherche à contourner un sujet d’actualité pour éviter de continuer à alimenter le débat, de ralentir le rythme d’envoi d’informations sur un sujet qui menace de devenir populaire.

Le déplacement d’attention

Le déplacement d’attention consiste à transférer l’attention portée par les médias ou le public sur une situation vers une autre. Il s’agit par exemple d’essayer de rejeter les critiques vers un adversaire de façon à ce que toute l’attention médiatique se détourne vers lui, l’obligeant ainsi à se placer sur la défensive.

La temporisation

Cette démarche est utilisée lorsqu’il devient essentiel de diffuser une information qui aura un impact préjudiciable, soit parce qu’il est inévitable de diffuser l’information soit pour la diffuser avant que d’autres ne le fasse (médias, adversaires...). La technique consiste à faire de la rétention d’information jusqu’à ce que la diffusion soit moins préjudiciable. Le contexte a évolué ou l’information était datée. Certains acteurs attendant par exemple que la scène médiatique soit occupée par d’autres problématiques pour diffuser l’information préjudiciable dans l’espoir que celle-ci passe inaperçue.